Sorti en 2023, Sur les chemins noirs, adapté du récit autobiographique de Sylvain Tesson, suit le périple d’un homme brisé qui entreprend de traverser la France à pied pour se reconstruire. Après une chute de plusieurs mètres qui aurait pu lui coûter la vie, Pierre (interprété par Jean Dujardin) choisit de quitter la ville et ses habitudes pour arpenter ces routes oubliées qu’on appelle les “chemins noirs”. Loin du bruit, des écrans et du rythme effréné du monde moderne, il cherche avant tout à se retrouver.
Un voyage physique, mais surtout spirituel
Pendant 1h33, Denis Imbert filme la lente renaissance d’un homme confronté à ses limites. Le film prend son temps, assume sa lenteur et sa contemplation, comme si chaque plan devait respirer. La France qu’il traverse devient un personnage à part entière : montagnes, forêts, ruisseaux, villages isolés.
Ce décor sauvage sert de miroir à l’état intérieur du héros. Pierre avance, tombe, se relève, souvent seul, parfois croisant des visages bienveillants, mais toujours animé par ce besoin vital de redonner un sens à sa vie.
Une fin à contre-courant du cinéma traditionnel
Là où d’autres films auraient opté pour un final fort, Denis Imbert choisit le silence. Dans la dernière scène, Pierre atteint enfin la Méditerranée. Le voyage s’achève comme il a commencé : dans le calme. Il contemple la mer, sans un mot. Aucune musique triomphante, aucune réplique symbolique. Juste le bruit du vent et celui des vagues.
Cette sobriété déstabilise certains spectateurs, mais elle résume parfaitement le message du film : la reconstruction n’a rien de spectaculaire. C’est un travail lent, discret, intime. Pierre n’est pas “guéri”, il est simplement en paix.
Un rôle à contre-emploi pour Jean Dujardin
Habitué aux registres comiques ou flamboyants, Jean Dujardin surprend par sa retenue. Le visage souvent fermé, le regard fatigué, il incarne avec justesse la douleur silencieuse et la détermination tranquille de son personnage. Peu de dialogues, beaucoup de regards et de silences, l’acteur joue ici sur le non-dit, avec une intensité rare.
Une conclusion pleine de sens
La fin de Sur les chemins noirs n’offre pas de révélation, mais une respiration. Pierre est vivant, debout, apaisé. Le film s’arrête là où commence autre chose : une vie plus lente, plus lucide. C’est une conclusion fidèle à l’esprit de Sylvain Tesson, qui, dans son livre, écrivait : “Je voulais voir si j’étais encore vivant.”
En refermant le film, on comprend que oui, il l’est. Et nous aussi, un peu, après l’avoir suivi sur ces chemins oubliés.





