Suzume : la fin du film de Makoto Shinkai enfin décryptée

AM.wiss

Le long-métrage d’animation japonais « Suzume », sorti en 2023, continue de fasciner les spectateurs à travers le monde. Signé Makoto Shinkai, le réalisateur déjà culte de Your Name et Les Enfants du temps, ce film poétique et énigmatique s’achève sur une séquence bouleversante que beaucoup ont tenté d’interpréter. Retour sur une fin riche en symboles, entre fantastique, deuil et renaissance.

Une quête intime derrière les portes du Japon

À première vue, Suzume raconte une aventure fantastique : une lycéenne japonaise, Suzume Iwato, rencontre un jeune homme, Souta, en mission pour fermer d’étranges portes apparues aux quatre coins du pays. Ces portails libèrent des forces destructrices capables de provoquer des séismes.

Mais derrière cette trame d’heroic fantasy se cache une lecture beaucoup plus intime. Au fil du récit, on découvre que Suzume a elle-même vécu, enfant, le séisme du Tōhoku de 2011, qui a emporté sa mère. Depuis, elle grandit avec une douleur silencieuse, incapable de « fermer » la porte de ce passé.

Le final : un face-à-face avec son passé

Dans les dernières minutes, Suzume entre dans le mystérieux monde de l’« Ever-After », un lieu suspendu entre vie et mort. Elle y retrouve Souta, prisonnier sous la forme d’une chaise – transformation absurde en apparence, mais symbolique : il est devenu un “keystone”, un pilier chargé de maintenir l’équilibre du monde.

C’est là que tout se recoupe : la jeune fille se confronte à elle-même, littéralement. Elle rencontre son “moi” enfant, celle qu’elle était avant la tragédie, perdue et terrifiée. En lui tendant la chaise qu’elle avait autrefois trouvée parmi les décombres, elle lui murmure : « Je suis ton avenir. »

Un geste simple, mais lourd de sens. Suzume referme la porte du désastre, mais surtout celle du chagrin, acceptant enfin de vivre avec ses souvenirs plutôt que contre eux.

Une conclusion lumineuse

Le film se clôt sur une scène miroir du début. Suzume rentre chez elle, à vélo, dans la lumière du matin. Souta réapparaît, à nouveau humain, et elle lui dit simplement : « Okaeri », qui signifie « bon retour ». Pas de baiser, pas de déclaration spectaculaire : juste la paix retrouvée.

Makoto Shinkai a expliqué dans plusieurs interviews que la fin de Suzume n’était pas une romance classique, mais une métaphore de la résilience japonaise après les catastrophes naturelles. « Fermer une porte, c’est aussi refermer une plaie », confiait-il dans un entretien à The Japan Times.

Entre rêve et cicatrice

Comme dans Your Name, Shinkai brouille les frontières entre fantastique et émotion brute. Sauf qu’ici, la magie ne sert pas à unir deux amants, mais à réparer une mémoire collective.

La dernière image, celle d’une adolescente apaisée, évoque moins un “happy end” qu’un nouveau départ. Une façon pudique et puissante de dire que certaines blessures ne disparaissent jamais, mais qu’on peut apprendre à vivre avec elles.

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