Les Passagers de la nuit : la fin bouleversante du film de Mikhaël Hers, entre solitude et renaissance

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Sorti en 2022, Les Passagers de la nuit a marqué les spectateurs par sa douceur et son humanité. Derrière ses airs de chronique parisienne, le film de Mikhaël Hers cache une fin d’une rare émotion, où chaque silence raconte la reconstruction d’une femme.

Un film tout en douceur, porté par Charlotte Gainsbourg

Dans Les Passagers de la nuit, Mikhaël Hers raconte l’histoire d’Élisabeth, une mère de famille parisienne qui, dans les années 80, tente de se relever après une séparation. Sans grandes démonstrations, sans cris ni larmes, le réalisateur filme la résilience, la tendresse, les gestes du quotidien.

Charlotte Gainsbourg incarne cette femme avec une pudeur bouleversante. Abandonnée par son mari, Élisabeth élève seule ses deux enfants, Matthias et Judith, et décroche un emploi dans une émission de radio nocturne. C’est là qu’elle croise Talulah, une jeune fille errante, paumée, mais pleine de vie. Le film, en apparence tranquille, devient alors une sorte de refuge : celui des âmes perdues qui cherchent un foyer, même temporaire.

Une fin sobre, mais déchirante

La conclusion du film, fidèle au style de Mikhaël Hers, refuse le spectaculaire. Talulah, après un passage marquant dans la vie d’Élisabeth, s’en va sans prévenir. Elle disparaît, comme elle est arrivée — libre, insaisissable, mais profondément humaine.

Les années passent. Matthias, le fils, devient adulte et prend la voix du narrateur. Le récit s’élargit, glissant doucement de la mère vers l’enfant, comme si la vie continuait, tout simplement. Élisabeth, elle, reste à Paris, seule mais apaisée. Elle a trouvé une forme de paix. Ce n’est pas une fin triste, c’est une fin vraie, où le temps répare à sa manière.

Dans les dernières minutes, le film s’ouvre sur la ville endormie. Élisabeth regarde dehors, comme si elle disait adieu à tout ce qu’elle a été. C’est bouleversant de retenue. Une fin à la fois mélancolique et lumineuse, où l’amour n’est plus flamboyant, mais discret, enfoui dans la mémoire.

Le style Hers : entre la nuit et la lumière

Mikhaël Hers a toujours filmé la fragilité du quotidien. Déjà dans Amanda ou Ce sentiment de l’été, il travaillait cette émotion suspendue, entre tristesse et beauté. Les Passagers de la nuit poursuit ce sillon : c’est un cinéma du passage, du temps qui s’écoule, des rencontres qui transforment.

Le réalisateur évoque une époque sans nostalgie forcée, les années 80 servent de décor sensible, pas d’alibi vintage. Les musiques, les décors, les voix de radio, tout contribue à ce sentiment de flottement. Comme si la vie ne tenait qu’à ces instants-là : une chanson de nuit, un geste tendre, une fenêtre ouverte sur Paris.

Une émotion qui reste longtemps après le générique

Ce qui bouleverse, ce n’est pas tant ce qui se passe que ce qui reste. La douceur d’un regard, une parole, un adieu non prononcé. Les Passagers de la nuit ne clôt rien : il laisse derrière lui un parfum d’humanité, un souvenir de chaleur.

Mikhaël Hers signe un film rare, à la fois pudique et vibrant, qui redonne du sens à la lenteur. Et quand le générique s’éteint, on comprend que le véritable voyage n’était pas dans la nuit, mais dans la lumière qu’on retrouve au matin.